Dans les années 70 où j’ai commencé à faire de la musique, j’étais très attiré par les chanteurs camerounais de l’époque : (Ekambi Brillant , Françis Bebey , Kemayo, Andre Marie Tala et bien d’autres…). Mais j’aimais aussi les musiciens noirs-américains. Vous allez rire car j’étais plus influencé par les chanteuses que par les chanteurs : jusqu’ à ce jour, je trouve la voix féminine plus riche en émotions et en nuances que la voix masculine. Serge Pognon 

Cette semaine, Serge Pognon (SP)   nous accueille dans son univers. C’est dire que la carrière (avocat) n’a pas su étouffer la passion et le talent artistiques. Nous le soulignons souvent ici, chacun a ce « quelque chose »  que nous souhaitons qu’il n’abandonne pas à cause du train-train quotidien. Une passion, un don, un talent…peu importe comment vous le nommez. Serge Pognon, l’a et nous le fait savoir. Embarquement immédiat avec notre talent et Camelle ADONON  qui a mené l’entretien!  YF

 

TDB : Bonjour Serge POGNON, un honneur pour nous d’interviewer le grand maestro. Présentez- vous à nos amis lecteurs.

SP: Tout d’abord merci pour ce bonheur et cette joie absolue que vous me faites en m’accordant cette interview.
Cependant, …sachez que …(Rires)…, .je ne suis ni ‘’grand ‘’ (car je ne mesure que 1m67) ni ‘’maestro’’, (car ne maîtrisant encore, en définitive, que si peu de choses en cette vie)…En revanche je peux vous dire que je suis né en 1964, issu d’une famille bénino- togolaise. J’ai grandi à la fois au Benin, en France, mais j’ai également vécu aux Etats Unis. Je suis avocat de profession, célibataire sans enfants, et profondément musicien-chanteur dans l’âme.

TDB : L’avocat dans l’exercice de sa fonction s’exprime devant une Auguste assemblée. Le musicien quant à lui chante parfois devant des milliers d’admirateurs. De la toge au micro et vice-versa, qu’est-ce qui s’est passé entre temps ?

SP: D’abord, l’avocat ne plaide pas pour une salle ou une assemblée mais plutôt devant des juges qu’il doit s’efforcer de convaincre pour la défense de son client. Cela crée une situation psychologique et mentale différente de celle du musicien qui, lui, porte à la connaissance du public son art. Ceci dit, Il ne s’est rien passé entre ma robe d’avocat et mon micro de chanteur, étant donné que j’ai toujours chanté depuis tout petit à l’école , au collège et même durant mes études universitaires, tout en passant en classe supérieure et en réussissant à mes multiples examens.

 

POGN

Serge Pognon..la musique dans les veines

Le professionnel que je suis n’a jamais été séparé de l’artiste, mais je ne mélange pas les deux activités.

 

TDB : Et vos parents vous ont laissé poursuivre deux à la fois? Les études et la musique?

SP: J’ai eu de la chance de naître dans une famille où la  seule obligation est celle de la recherche de l’excellence : le maître mot de mon feu père était : fais ce que tu veux, mais sois bon.

 

TDB : Devra-t-on en conclure que Serge POGNON, est un homme qui aime le feu des projecteurs ?

SP: Ouh lalà là …Quelle vilaine image vous utilisez là ! Je pense qu’on ne peut être sincère dans ce que l’on entreprend lorsque le but poursuivi est de rechercher ‘’ le feu des projecteurs’’. Il faut laisser le feu des projecteurs vous découvrir, vous suivre, plutôt que le chercher.

 

TDB : Quand on sait que vous avez partagé des podiums avec Angélique Kidjo, racontez-nous un peu comment avez-vous vous avez passé votre jeunesse.

SP: Ma jeunesse n’a rien eu d’extraordinaire. Comme (identique à celle de) n’importe quel jeune. Il y a des choses très sérieuses sur lesquelles les parents ne badinaient pas comme les études, l’école, les cours… Et puis il y a les hobbies : pour certains c’est le sport, ou la lecture, ou les jeux de société ou tout autre… Mais moi, mon passe-temps était ma passion pour la musique : soit que j’écoutais, soit que je jouais, en orchestre ou en composant des chansons. Mon temps était donc partagé entre les études, et la musique

 

 

POGNI

TDB : Quels ont été vos premiers modèles dans le domaine de la musique?

SP: Dans les années 70 où j’ai commencé à faire de la musique, j’étais très attiré par les chanteurs camerounais de l’époque : ( Ekambi Brillant , Françis Bebey , Kemayo, Andre Marie Tala et bien d’autres… ). Mais j’aimais aussi les musiciens noirs-américains. Vous allez rire car j’étais plus influencé par les chanteuses que par les chanteurs : jusqu’ à ce jour, je trouve la voix féminine plus riche en émotions et en nuances que la voix masculine.

 

TDB : Le Bénin est un pays d’une diversité culturelle impressionnante et regorge de plusieurs rythmes musicaux aimés parfois même au- delà de ses frontières. Pourquoi avoir laissé les styles musicaux du terroir pour vous consacrer au jazz ?

SP: Je n’ai rien laissé du tout. Je produis ce qui sort naturellement du tréfonds de mon âme et de ses états. , Ce n’est pas de ma faute si les lignes mélodiques, les couleurs harmoniques qui me parlent sont plus universellement orientées plutôt que typiquement béninoises.

 

TDB : Avez-vous des contacts avec Lionel LOUEKE, l’autre « Démon » du jazz ?

SP: Oh non…je ne vous laisserai pas dire ‘’ démon ‘’ car les mots ont une ‘’charge’’ spirituelle et émotionnelle. Lionel LOUEKE n’est pas un démon ! C’est un démiurge du jazz : c’est un ange créateur du jazz ! Oui, Lionel m’a invité par deux ou trois fois dans le passé à participer à ses spectacles à Cotonou, et à ses cotés sur scène : j’en garde un émouvant souvenir.

 

TDB : Nous avons de jeunes talents qui font leur preuve dans le domaine de la musique, en tant qu’un homme expérimenté en la chose, quel message passerez-vous à ces jeunes gens ?

SP: Je viens d’une époque où nous nous formions sur le tas, avec des instruments très rudimentaires, mais surtout avec le contact fréquent avec le public dans des spectacles ‘’live’’. Les studios d’enregistrements étaient analogiques : le son était pris en même temps avec tous les musiciens et lorsqu’un seul d’entre eux jouait une fausse note, ou se trompait, il fallait recommencer tout le morceau depuis le début. Cela vous forme.
Aujourd’hui, les avancées technologiques semblent rendre la pratique musicale plus aisée parce que tout est corrigeable techniquement plutôt qu’artistiquement., Le play-back a été entre- temps sublimé et la multiplicité des médias fait croire qu’on devient vite et aisément une  « star’’.
Mon message est de dire aux « jeunes talents » de rester très ancrés sur terre, humbles et toujours, toujours et encore toujours, repolir et travailler leur art, quel qu’il soit.

 

 

SP

 

TDB : Vous êtes auteur, compositeur et guitariste. Quel plaisir y a-t-il à se consacrer à la guitare et non à l’orgue ou à la flûte par exemple?

SP: Je ne me considère PAS DU TOUT comme guitariste : la guitare me sert d’appoint pour travailler mes idées musicales mais je ne mérite pas le qualificatif de guitariste
Bizarrement, il se trouve que j’adore les deux (02) instruments que vous me citez ( orgue et flûte) mais la guitare a ceci de ‘’jouissif ‘’qu’elle est à la fois harmonique et percussive. , donc vous imprimez votre couleur harmonique au morceau et vous travaillez de diverses façons la rythmique que vous souhaitez : la guitare a un caractère à la fois caressant, percussif, doux ou violent, bref…la guitare est tout un monde….

 

TDB: La musique et le bruitage. Il y a certainement une différence foncière entre chanter, véhiculer un message et transpirer (et faire faire transpirer.) Où se situe-t-elle cette différence selon vous?

SP: (Rires) …Faites- vous référence à ce qu’on écoute actuellement dans les médias ?…rires… Je ne veux pas faire d’ostracisme : toute expression musicale vaut le détour, tout dépend du but recherché par l’artiste et de l’état d’esprit de celui/celle à qui les sons, sont destinés. La seule exigence est que ce soit du bon son toujours avec l’idée du respect du public !

 

TDB : Dans la même veine, l’on pourra dire qu’un musicien doit avant tout divertir et sensibiliser ceux qui l’écoutent. Que pensez- vous de ces jeunes qui chantent la perversité, la dépravation… ?

SP: Je n’ai qu’un seul mot : c’est dommage…Mais, peut- être que ces jeunes sont-ils victimes de leur époque telle que révélée et entretenue par les médias.

 

TDB : Votre deuxième album est intitulé  » Feeling of joy ». Qu’est-ce qui vous l’a inspiré ? Et quelle mission lui assignez-vous?

SP: ‘’Feeling of joy’’ est venu contrecarrer l’atmosphère un peu mélancolique du premier album ‘’ aimer’’. Il fallait que je vous révèle que Serge POGNON peut être aussi un peu ‘’fou fou’’ … (rires). ‘’Feeling of joy’’ sous la houlette de mon directeur artistique et arrangeur, Moise ASSIGNAME, est un peu plus orienté couleur « afro’’ dans les rythmes.

 

TDB: Comment expliquez-vous le fait que vous soyez moins connu au Bénin qu’à l’extérieur ?

SP: Je ne sais pas….Vous êtes le premier magazine et média à vous intéresser à moi depuis la parution de mon album. Peut- être qu’avec l’étendue géographique des réseaux sociaux et des plateformes de téléchargement, les médias locaux ont l’impression que je leur échappe … (rires)

 

 

serge gno

 

TDB: Avez-vous déjà pensé à quelle politique mettre en place pour que le Bénin ait une maison de disque digne de ce nom ?

SP: Il ne s’agit pas de mettre une politique en place, mais il faut des personnes avec le courage, l’énergie, la volonté , la détermination d’entreprendre et d’entreprendre qualitativement.. Rien n’est facile ou donné d’avance. : Il faut savoir faire les sacrifices adéquats et non pas tout attendre de l’autre.

 

TDB: Bénin Passion a été une belle initiative qui n’a pu être perpétuée. Et les anciens sont là, qui vieillissent. Que pensez-vous qu’on puisse faire de toute urgence pour sauver leurs œuvres et leur mémoire de l’oubli?

SP:  Ben…vous, Talents du Benin, vous êtes déjà là pour leur donner de la visibilité qu’il faut, … non …? Nous avons des tas de chaînes de télé et de radio et des magazines dont le but , entre autres, est de promouvoir et divulguer les œuvres . Si, en plus, les œuvres sont bonnes et appréciées du public elles ne disparaîtront pas, de même que leurs auteurs. Vous savez, .GG VICKEY n’a pas eu besoin d’un déchaînement médiatique ou politique pour que ses œuvres perdurent jusqu’à aujourd’hui et elles perdureront encore.

 

TDB : Définissez-vous en trois mots.

SP: En trois mots, c’est difficile… (Rires) Il faudrait tout un dictionnaire et tout l’alphabet pour me définir…je suis tellement complexe ! (rires)

 

TDB: En tant que Béninois, comment définissez-vous la musique ?

SP: Pas spécifiquement en tant que Béninois, mais de façon universelle la musique c’est de: la mélodie, de l’harmonie et du rythme.

 

TDB : Votre passion pour la musique est-elle appréciée de votre épouse et de vos enfants ? Quel impact vos chants ont-ils sur eux?

SP: J’ai une grande famille plutôt qu’une petite famille (femme, enfants). Et, ma grande famille m’a toujours soutenu tout en étant très critique, positivement comme négativement, par rapport à mes œuvres.

 

TDB: En dehors de Angélique KIDJO, comment expliquez-vous qu’aucune voix béninoise ne figure parmi les artistes mondialement connus ?

SP: Tout simplement parce qu’il n’y a qu’une seule et unique Angélique Kidjo. Chacun doit se battre pour construire sa renommée. J’imagine les énormes sacrifices qu’Angélique Kidjo a dû faire pour bâtir sa vie d’artiste et sa renommée internationale.  Les autres artistes sont- ils prêts à se plier aux mêmes exigences ?

 

TDB: L’une des définitions classiques et universellement admises de la musique est celle qui croit que la musique est l’art de combiner les sons d’une manière agréable à l’ouïe. Pensez-vous qu’il suffise que les sons soient bien combinés et que cela flatte l’ouïe pour que ce soit nécessairement de la bonne musique ?

SP: Tout est tellement relatif en ce domaine. La question qui se pose est une question de satisfaction individuelle à l’écoute d’un son. ; Dans ce cas, je répondrai que l’appréciation est fonction de la culture, de l’éducation et aussi du milieu géographique musical qui est votre référence.

TDB: Quel est votre repas adoré ?

SP: Riz -poisson

 

TDB: Votre plus grand défaut ?

SP: Je suis très taquin… (mais hélas tout le monde ne me comprend pas toujours)

 

TDB: Qu’est-ce qui vous fait le plus sourire ?

SP: J’adore rire de tout, ça déstresse !

 

TDB : Si Serge Pognon devait choisir aujourd’hui son âme sœur, qui serait-ce ?

SP: Je ne sais pas. …Je n’ai pas d’a priori… Question de vibration d’âmes sans doute.

 

TDB :; Si vous devriez faire un featuring avec un artiste de la musique traditionnelle, lequel serait-il ? Pourquoi ?

SP: J’aime bien Janvier Denagan Honfo mais aussi Gbessi Zolawadji, tous deux ont des timbres de voix très particuliers.ères

 

TDB : Si vous étiez un sport, lequel serait-il ?

SP: Je fais beaucoup de natation.

 

TDB: Une personnalité politique?

SP: Ce serait soit ou politicien qui utiliserais la culture, soit un homme de culture qui l’utiliserait pour la politique. Donc, je dirai peut être Césaire ou Senghor ou Malraux ou Gilberto Gil ou Michel Martelly (l’ancien Président d’Haïti) …bref , la liste est longue.

 

TDB: Un rappeur ?

SP: Je ne sais pas, je préfère le SLAM

 
SPG

 

TDB: Un percussionniste?

SP: Doudou N’diaye Rose qui a réussi à monter et faire connaître un ensemble orchestral composé uniquement de percussions

 

TDB: Votre calendrier artistique de cette année 2019, comment se présente-t-il ?

SP: Beaucoup d’événements intéressants à venir et surtout je continue d’essayer de faire connaître mon deuxième album ‘’ feeling of joy ‘’

 

TDB : Votre mot de fin

SP: Je n’ai pas de mot de fin…Ce n’est qu’un début …(rires). …Et merci encore pour votre intérêt pour ma modeste personne.

 

TDB : Merci à vous et bon vent !

SP: Idem à talents du Benin. Continuez à faire ce que vous faites.…

 

                 Camelle ADONON, Interviewer TDB 

 

                              Talents Du Bénin (c) 2019

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Serge Pognon: La liberté de chanter!

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